Le socle


 



Le concept d'Archipel a été vulgarisé et appliqué par le collectif​ Archipel Citoyen Osons les Jours Heureux
Il est basé sur la pensée d’Edouard Glissant, écrivain, poète et philosophe
Il s’attache en particulier à l’inter-coopération entre plusieurs collectifs/communautés (des îles) ayant chacun sa spécificité, sa culture, sa raison d’être, son histoire, … et qui partagent une vision commune et des envies de coopérer sur diverses projets (les pirogues).

Cela permet à des projets de naître même si les forces vives, les compétences, les envies à l'intérieur d'un collectif ne sont pas suffisantes. Elles peuvent exister à l'extérieur avec d'autres forces vives, compétences et envies dans d'autres collectifs ou avec des personnes qui ne font pas partie de collectifs.
La diversité est vue comme une force. Et donc, le concept d'Archipel joue avec deux besoins fondamentaux : le besoin de singularité et le besoin d'appartenance à une communauté, ici la communauté large des collectifs et individus qui partagent une vision commune pour combattre le fléau de l'inceste et des violences sexuelles.

La prise d’initiative et l’autonomie sont favorisées.
Il n'y a pas d’organisation centrale pour piloter l’ensemble des projets, mais une entité (le voilier) pour faciliter l’émergence des projets et les soutenir.

 

 

Lien vers le document explicatif de La Bascule accessible sur leur page dédiée. Nous vous engageons à découvrir ce document (2 pages d'explications) dont voici un extrait :

"Faciliter la coopération entre organisations dans le respect et la valorisation de nos
différences. “Rassemblons nous mais ne nous ressemblons pas.”

  • Créer de meilleures conditions pour l’entraide et la mutualisation de ressources.
  • Permettre la prise en compte de l’existence d’une multitude de projets et d’organisations et d’agir en conscience de cela.
  • Aider à comprendre et travailler sa singularité en tant qu’acteur des Transitions et identifier des relations à construire avec d’autres.
  • Coexister et coopérer sans que cela implique d’être d’accord sur tout."

Dans le concept d'archipel, chaque île (collectif) possède une identité-racine, à savoir sa raison d'être, son histoire, sa singularité dans ce qu'elle est, ce qu'elle fait et comment elle le fait.

Elle possède également des identités-relations avec d'autres îles, reposant sur deux dynamiques qui s'articulent et qui font une partie de l'efficacité des relations et plus globalement d'un tel écosystème :

  • se rendre visible .. pour être vu ; cela se traduit sur Archipel Ciivise1 par le référencement sur la carte et les informations qui facilitent la prise de contact ; c'est aussi rendre visible ce que l'acteur peut partager et ses besoins et envies de coopération
  • voir ; cela se traduit par ce que chaque acteur peut découvrir des autres acteurs en utilisant cette carte, notamment de manière proactive.

"Se rendre visible" et "Voir" sont deux enjeux qui font indéniablement écho par rapport au combat contre le fléau de l'inceste et des violences sexuelles : deux dynamiques indissociables pour faciliter la libération de la parole.

Ce qui complète l'efficacité, c'est l'information qui peut être donnée régulièrement aux différents acteurs et le travail du "voilier", à savoir un rôle pour faciliter les rapprochements.


 

Voici comment s'est exprimé Patrick Chamoiseau, écrivain originaire de la Martinique (émission Mediapart), à propos de l'idée de relation présente dans le concept d'archipel :

"L'idée de la relation suppose que je me réalise dans le soucis de l'autre.
C'est la plénitude de l'autre qui assure ma plénitude.
Et je ne peux m'envisager aujourd'hui que dans une mise en relation non seulement avec l'autre, mais avec l'étranger, mais aussi avec le vivant, mais aussi avec la planète, mais aussi avec le cosmos, tout ce qu'on peut imaginer comme écosystème dans lequel nous devons vivre aujourd'hui... et puis c'est soi-même, la complexité qu'il y a avec soi-même
".

Combattre le fléau de l'inceste et des violences sexuelles relève d'une bienveillance qui devrait être naturelle, instinctive, prioritaire, ... envers les enfants.

Cette bienveillance envers les enfants s'articule avec la bienveillance à soi-même et avec la bienveillance envers tous les acteurs qui ont la responsabilité des enfants. En ce sens, la protection - immédiate - des enfants concernés va de pair avec la Qualité de Vie [au Travail] des professionnels et bénévoles qui oeuvrent pour protéger les enfants. Et cela passe notamment par la responsabilité de l'Etat et des collectifs de donner du temps, des moyens, des outils, des soutiens, de la reconnaissance, ... aux collectifs et aux individus. Et c'est tout autant la responsabilité de l'individu de prendre soin de sa propre Qualité de Vie [au Travail] pour éviter de se surengager avec des risques de contre-productivité envers le combat mené, voire une disparition du paysage de la protection si un burnout survient.

Pour assurer la vitalité de l'écosystème de l'archipel, il est nécessaire que la bienveillance se joue entre collectifs. Et pour cela, il s'agit de s'extirper de tendances fortes à la singularité, à l'égo, à la compétition entre collectifs (et à l'intérieur des collectifs). Un tel combat nécessite impérativement de taire les égos qui prennent trop de place.

Au contraire, un principe de bienveillance et d'efficacité doit être cultivé : un tel écosystème, un tel combat s'articule autour de 4 dimensions de bienveillance indissociables :

  • je prends soin de moi (que je sois un collectif ou un individu)
  • je prends soin des enfants, des personnes protectrices, des autres collectifs, des autres individus dans les collectifs
  • je prends soin du collectif et de l'écosystème auquel j'appartiens (verticalité ascendante)
  • en tant que collectif, je prends soin des personnes qui le constituent (verticalité descendante)

Une telle cartographie, préfiguratrice d'une cartographie beaucoup plus vaste allant au-delà des signataires de ce texte fédérateur permet d'identifier les autres acteurs, de pouvoir contribuer à leur vitalité, à la vitalité de l'écosystème, et aussi de pouvoir se renforcer, et renforcer sa propre vitalité grâce aux compétences, savoirs, au souffle, ... des autres acteurs. Et "connaître" constitue le premier pas vers "reconnaître". Elle permet de cristalliser les énergies pour coopérer au sein des territoires, sur des thématiques, autour de telle ou telle préconisation, pour capitaliser sur des bonnes pratiques, pour mutualiser, pour se mobiliser, ...

Exiger du gouvernement une vraie politique publique forte face à l'inceste et aux violences sexuelles, c'est aussi exiger que soit assurée la Qualité de Vie au Travail de tous les acteurs en responsabilité de la prise en charge des enfants victimes, ET aussi plus largement de tous les acteurs en responsabilité des enfants pour que la politique de prévention primaire (éviter les passages à l'acte) soit effective et déterminante pour une dynamique allant vers l'éradication de ces actes.

Il s'agit aussi de prendre conscience des impacts négatifs, voire dévastateurs, des décisions gouvernementales depuis mi-décembre 2023 concernant la CIIVISE sur les victimes, et par rayonnement sur leurs entourages personnels et professionnels.


 

Il y a un parallèle utile à faire entre l'impuissance de l'enfant pris entre les griffes de son agresseur, celle du parent protecteur (souvent la mère) avec une autre forme d'impuissance : celle des professionnels de l'enfance qui peuvent se trouver désarmés et/ou non soutenus quand un enfant signale des actes sexuels à son encontre, ou quand des signes dans son comportement peuvent laisser à penser qu'il en est victime.

Ce parallèle, c'est une impuissance solitaire qui peut conduire à des comportements de fuite, d'inhibition à l'action et à des impacts négatifs sur la santé mentale.

Une impuissance solitaire qui peut se conjuguer d'une frustration à se dire qu'on est seul dans son coin, et que d'autres le sont aussi, que l'on peut être très nombreux dans ce cas (combien ?), mais qu'il  n'y a rien pour se relier et faire ensemble. En ce sens, on voit bien en quoi les réunions publiques de la CIIVISE ont été un formidable réussite.

Cette impuissance solitaire au niveau individuel peut aussi gagner le collectif. Certains collectifs peuvent se sentir impuissants face à l'immensité de ce combat, et plus opérationnellement, par rapport au nombre d'enfants, à la charge de travail auxquels ils sont confrontés.

Construire un tel écosystème, outillé par cette cartographie, permet de construire, de trouver, de retrouver de la puissance coopérative avec d'autres acteurs, de mutualiser, de ne pas réinventer la poudre, de porter plus fort des messages à plusieurs, ... Et la puissance coopérative crée démultiplie les possibles, mais aussi elle impacte positivement la Qualité de Vie [au Travail] des individus (facteur de santé mentale) et la bonne santé des collectifs.